Les paysages complexes de l’hydro-électricité française mobilisent un capital infrastructurel, technique, naturel et humain considérable et efficace. L’eau est la première source d’énergie électrique renouvelable et la deuxième source de production électrique en France. Toutefois, fait relativement paradoxal alors que l’on s’engage dans la transition des modèles énergétiques, la production d’hydroélectricité est en crise. Elle souffre d’une relative inertie, voire d’une forme de désengagement. C’est l’effet de la fragilisation progressive de son modèle économique et de l’inflation normative issue de politiques publiques parfois contradictoires. Les cours d’eau n’ont pourtant franchi aucun seuil de saturation de leur exploitation.
On peut diviser l’hydroélectricité en deux grandes catégories :
-Celle issue des grandes infrastructures, notamment des barrages, bénéficie de leur capacité de stockage. Leur grande flexibilité rend des services primordiaux au réseau électrique national, permettant d’assurer une sécurité d’approvisionnement à toutes heures de la journée, notamment en cas de pic de consommation.
-Hors barrage et infrastructure, l’énergie hydraulique des moulins ou des hydroliennes au fil de l’eau est largement non exploitée, peu valorisée parmi les nouveaux terrains de recherche ou d’investissement - c’est à dire dissipée et donc massivement disponible. Il y a là un potentiel de d’accroissement et de diversification de la production hydroélectrique, basée sur une technologie « mature » et cohérente avec les transformations en cours des systèmes de production d’électricité.
« Aujourd’hui les systèmes de production d’électricité connaissent de profondes transformations conduites par la diversification et la décentralisation de la production d’électricité combinée à l’émergence de modes électroniques avancés de gestion la complexité et l’échelle croissantes des systèmes de production modernes. Les changements technologiques, en retour modifient la manière dont l’énergie est achetée et vendue : le modèle centralisé du XXème dans lequel production et distribution sont assurées par un nombre limité d’acteurs évolue vers des plateformes d’échange multi directionnelles ouvertes au marché dans lesquelles la division des rôles entre producteur, distributeur et consommateur tendent à se superposer ou à devenir floues. »
IL nous semble pertinent (en complément de l’approche infrastructurelle qui est aujourd’hui privilégiée) d’ouvrir largement la production hydroélectrique française à des logiques plus diffuses ; de miser sur des matériels plus légers, plus discrets, sur des rendements plus faibles mais plus nombreux, organisés en constellations.
Il s’agit de mobiliser des gisements abandonnés ou ignorés et de mesurer leurs capacités communes pour poser dans le détail la question suivante :
Comment ces logiques diffuses, au plus près de la ressource, appliquées à des territoires conséquents, peuvent-elle contribuer à la transition énergétique et à la définition de nouvelles formes d’espaces habités ?